ARCHIVE
Édition 2017
Place du Bouffay
La part manquante
BORIS CHOUVELLON

Boris Chouvellon est fasciné par les espaces frontières – zones de loisirs, agricoles, industrielles, commerciales ou constructions à l’abandon – qu’il nomme « esthétique de la zone ». Il y emprunte des objets, formes, impressions qu’il transforme.

En se référant à l’architecture moderne et brutaliste, l’artiste entend produire une représentation de la ruine moderne. Son monde se compose alors d’ersatz de piscines dressées, manèges désossés, toboggans déglingués, mobile composé de godets de pelleteuses, barques trop lourdes pour naviguer… Mêlant humour et désillusion, ses œuvres s’affirment comme des ruines du futur de notre société. La place du Bouffay est projetée dans un autre temps, celui d’un lendemain supposé, avenir présumé d’un monde désenchanté. Des nappes scintillant de sel recouvrante sol et rappellent l’absence forcée de l’eau, la proximité de l’océan ou… une montée des eaux qui aurait envahi Nantes ! 

Au centre de la place, faite d’acier de béton, une grande roue figée à laquelle une part manque s’érige tel un monument abandonné. En alternance avec des palmiers – symbole d’immortalité et standard végétal des fronts de mer – des godets de pelleteuse – outils du BTP et de l’archéologie – remplacent les nacelles. L’œuvre s’empare de notre imaginaire : la magie des forains qui arrivent en ville, la flânerie du regard tournoyant dans les hauteurs, le souvenir lointain de la fête. Dans la continuité de ses recherches sur l’esthétique de la ruine, Boris Chouvellon propose une œuvre brute qui inverse les rapports entre ce qui est précieux et ce qui ne l’est pas, entre le travail et le loisir, entre la présence et l’absence. Quant à la part manquante, elle a sûrement été emportée par une déferlante ailleurs dans la ville… Les plus curieux ne manqueront pas de la retrouver !