Exposition
Musée d’Arts de Nantes
Paquebots 1913-1942. Une esthétique transatlantique
25 Octobre 2024 — 23 Février 2025

Inscrivant le Musée d’arts de Nantes dans la grande histoire transatlantique des ports de Nantes-Saint- Nazaire et du Havre, l’exposition Paquebots 1913-1942. Une esthétique transatlantique explore comment ces géants des mers ont bouleversé les imaginaires et la création de l’entre-deux-guerres.

Poursuivant la programmation de grandes expositions transdisciplinaires, Paquebots 1913-1942, une esthétique transatlantique, met en évidence le rôle des nouveaux géants des mers des compagnies transatlantiques dans le développement d’une esthétique moderniste internationale.

Elle inscrit le Musée d’arts de Nantes au cœur de la grande histoire transatlantique des ports de Nantes-Saint-Nazaire et du Havre. Les années folles sont un âge d’or pour les paquebots, tout autant palaces flottants que machines modernes au profil fuselé, alors seuls véritables traits d’union entre la vieille Europe et les États-Unis. Avec la grande dépression et les différents Immigration acts (1917 et 1924), les grandes compagnies se tournent vers une clientèle de loisirs, y compris les intellectuels, écrivains et artistes en quête d’échanges avec l’autre continent.

Objet paradoxal, tout à la fois immeuble et mouvant, machinerie de pointe dédiée à la vitesse, et lieu de villégiature luxueuse où se mêlent, le temps d’une traversée, nationalités et milieux sociaux, le paquebot a brièvement incarné un rêve de modernité transatlantique.

Le paquebot comme objet moderniste

Œuvre d’art totale pour ses différents créateurs (aérodynamisme nautique, décor, architecture, mobilier), les paquebots sont une source d’inspiration pour les expérimentations des avantgardes qui le déclinent jusqu’à l’obsession. Peintres (Fernand Léger, Felix Del Marle, Charles Demuth, Jules Lefranc), photographes (André Kertesz, Jean Moral, Pierre Boucher, François Tuefferd), affichistes (Cassandre, Paul Colin), architectes (Eileen Gray, Robert Mallet-Stevens, Le Corbusier) et cinéastes (Walter Ruttmann, Buster Keaton) de tous pays s’emparent de l’image de ces géants des mers, explorant leurs silhouettes fuselées à la monumentalité menaçante ou décortiquant au contraire la perfection de leurs machineries parfois jusqu’à l’abstraction. Les photographies aux cadrages inédits et les tableaux particulièrement dynamiques d’hélices, de cheminées et de proues monumentales rejoignent le graphisme géométrique, quasi architectural, de publicistes de génie comme Cassandre (Paquebot Normandie, Le Havre–Southampton-New York, 1935), créant un nouveau langage international.

La traversée comme expérience extra-ordinaire

L’univers du paquebot, unité grandiose et pourtant infime sur l’océan, brouille les rapports spatiotemporels (Jean-Émile Laboureur), devenant le lieu de tous les possibles, expérience existentielle et cosmopolite souvent inédite. En pleine montée des nationalismes, la traversée transatlantique devient une parenthèse apatride, qui a permis à toute une génération de voyageurs artistes, à chaque traversée, de se détacher de leur territoire national. Par ailleurs, l’unité de lieu et de temps que constitue cet objet mouvant autorise des audaces et des expérimentations sociales, toujours modernes, dont la mode et le cinéma (Leo McCarey, Elle et lui, 1938) se saisissent. Le temps de la traversée devient une odyssée initiatique vers un autre continent, promesse d’un renouveau pour les artistes. Pour Joaquín Torres García, les paquebots incarnent ce lien culturel, miroir de sa double nationalité catalane et uruguayenne. Entre 1915 et 1955, Marcel Duchamp embarque 19 fois sur des transatlantiques, poussé par les guerres mais surtout par son « esprit d’expatriation » – cette vision moderne du voyage qui déracine pour mieux renaître – et qui lui fait sans cesse partager sa vie entre Paris et New York. La genèse de la Boîte-en-valise débute dès 1934 : un projet de musée en réduction, portatif, pouvant symboliquement l’accompagner dans ses traversées. Mais l’« esprit d’expatriation » de sa boîte-envalise rencontre la violence de l’exil géopolitique. La délicieuse parenthèse apatride devient, à partir de la deuxième moitié des années 1930, douloureux déracinement pour ceux qui fuient la vieille Europe

L’exposition est coproduite avec le MuMa, Musée d’art moderne André Malraux du Havre où l’exposition sera présentée du 5 avril au 21 septembre 2025. Elle est conçue en partenariat exceptionnel avec Écomusée – Escal’Atlantic, Saint-Nazaire Agglomération Tourisme.

Commissariat
Adeline Collange-Perugi, conservatrice responsable des collections d’art ancien au Musée d’arts de Nantes Sophie Lévy, directrice conservatrice du Musée d’arts de Nantes Clémence Poivet-Ducroix, attachée de conservation, chargée des collections et de la documentation au MuMa (Musée d’art moderne André Malraux) Le Havre